Notre ami Patrice a publié sur son blog : https://evabouquine.wordpress.com/2016/11/06/carmen-laforet-nada/#more-1475 une analyse du roman de notre dernière rencontre où se perçoit toute la gravité dans laquelle a baigné la dernière séance du Café-Bouquins. Martine, une autre de nos lectrice, a rédigé le commentaire suivant : 

"Que reste-t- il de nos amours?  Que reste-t-il de nos splendeurs passées?

Elles sont sept à survivre dans une Barcelone d'après-guerre et elles ont faim.

  • Antonia, la dévote. Au temps de sa jeunesse, folle amoureuse. Au lendemain de la guerre, résignée à entrer au couvent.
  • Gloria, jolie, rien dans la cervelle, mère d'un enfant sans nom, épouse d'un homme que l'Histoire avec un "H" majuscule a rendu fou, joueuse occasionnelle de bars interlopes. Inactive par ailleurs.
  • La servante, étrange, fascinée par les mains du fils de la maison qui caressent les oreilles de son chien.
  • La mère et grand-mère, si bonne, si aimante, si dépassée par les événements, si portée à pardonner à tous, insomniaque. Aurait raté l'éducation de ses enfants.
  • Ena, la beauté personnifiée, amie de la narratrice, riche, belle, intelligente et libre.
  • La mère d’Ena qui, jeune, se mutila par amour et fit don de sa jolie tresse à l'homme qu'elle aimait. Devenue par force le prototype de l'épouse parfaite sous le franquisme.   (Ces deux dernières ne souffrent pas de la faim).
  • Et enfin, Andrea, la narratrice, spectatrice de la vie des autres, celle qui voit, observe et tente de rester intègre physiquement et mentalement dans une famille totalement déjantée.

Un monde de femmes confrontées à la folie de deux hommes:

  • Juan, l'artiste sans talent, besogneux, dont les toiles sont vendues aux chiffonniers, qui se mord souvent la joue, dont les yeux semblent tourner follement dans leurs orbites, violent, époux de Gloria, totalement possédé par son frère Roman.
  • Roman, le talentueux, le musicien hors pair, qui se comporte en pharaon, le fin goûteur de tabac et de café, animal, sadique qui par plaisir s'amuse du mal-être des autres et choisit de s'égorger quand il estime que le jeu est terminé, après avoir "croqué" les oreilles de son chien.

Un livre universel par le jeu des tensions psychologiques.

Un plaidoyer contre toutes les guerres car les personnages de Nada complètement déjantés, fous même, portent tous en eux la marque de la guerre, une guerre fratricide en Espagne.

La critique prétend que l'un des éléments nouveaux  dans Nada réside dans les "zones d'ombre" et" la mise à contribution" du lecteur. Que savons-nous exactement des activités de Román? Nous devinons qu'il devait être nationaliste puisque dénoncé par Gloria, il séjourne dans une cheka, centre de torture mis en place par les partis de gauche  dans lesquels on enfermait et torturait toute personne de droite, catholique,  ou simplement suspectée de l'être et dont on ne sortait que rarement vivant. Que savons-nous de l'enfance d’Andrea?  Que savons-nous réellement du physique d’Andrea en dehors de sa maigreur, sa longue chevelure, sa peau sombre et ses yeux clairs? La narratrice donne un cadre, au lecteur de compléter.Afficher l'image d'origine

Nada serait avec La Famille de Pascual Duarte de Camilo José Cela (Prix Nobel de littérature 1989) et La Sombra del Ciprés es Alargada de Miguel Delibes à l'origine du mouvement littéraire appelé "tremendismo": roman au réalisme existentiel: le roman de l'après-guerre où se mêlent angoisse, solitude, frustration et déracinement.

Il faut redire que, dès sa parution, Nada connaît un succès de librairie extraordinaire: 7 éditions en 5 ans. Il est récompensé par le Premio Nadal. C'est l'un des livres les plus traduits au monde avec le Quichotte et la Familia de Pascual Duarte.

La critique affirme que deux autres oeuvres de C.Laforet  méritent l'attention: l’Isle et ses démons (1952) et Une nouvelle femme (1955), analyse psychologique, histoire d'une conversion. 

Martine"

Date des prochaines rencontres :

-          7 janvier 2017 Attention, date modifiée !

Choix des lecteurs : G. Garcia Marquez, L’amour aux temps du choléra

-          18 mars 2017

-          6 mai 2017

Bonne lecture à tous,

à bientôt, au Bar Le Parisien, 49  rue Noël Ballay

Geneviève

Retour à l'accueil